Mucugê, Bahia, samedi 20 avril 2013, vers 10h du matin. Le cimetière de Mucugê est situé à l'écart, à flanc de l'escarpement rocheux qui domine la vallée. Bien qu'aujourd'hui c'est de ce côté-là que s'étendent les nouveaux quartiers. Une piste de terre rouge y conduit. D'un côté, un grand terrain où des gamins et des adolescents jouent au football. De l'autre, en l'approche de la croisée avec la grande route qui sur toute une longueur devient pavée, camions ralentir, un chapiteau de cirque, un bus antique aménagé qui en porte le nom, Kiara. Et bientôt, devant la petite porte verte, deux hommes et un cercueil ne passent pas, et sur le linteau il est écrit "Cemitério Santa Izabel" avec un 'z'.
Le cimetière a été installé ici à la suite de l'épidémie de choléra qui a sévi à Bahia au milieu du XIXème siècle. Accolé au mur, à gauche quand on entre, vers le fond, des rangées de casiers pour des urnes funéraires. La plupart sont vides.
C'est préparatoire (?).
Un chemin central, pierreux. De part et d'autre, du sable, en tout cas de la terre bien légère et blanche; ici et là, des petites boîtes oblongues qui sont des cercueils en dur, blanchis, de la taille d'enfants. Et puis quelques tumulis presque tous aplanis par les pluies le temps les vents, avec des croix de bois.
Les pauvres et les innocents.
On avance encore, pour se trouver au pied de ce qui fait la célébrité de ce cimetière, des sépulcres blanchis à la chaux, aux ornements étranges dans un tel lieu, les habitants de Mucugê l'ont surnommé dès le départ de 'bizantino', sans qu'il soit très clair ce qui était entendu par là.
Ici la roche affleure, éclate, se fend, se bombe, se creuse, s'oxyde, les boîtes mortuaires se pressent dans ses méandres, ses failles, ses béances.
J'ai parcouru le cimetière, et c'est en revoyant les photos que je me suis rendu compte que j'avais tourné autour, de cette petite encoche fermée par une vitre, sur laquelle j'avais collé l'appareil pour tenter de voir ce qu'il pouvait y avoir derrière, dedans, au-delà.
Voici enfin une vue depuis presque le fond du cimetière - une tombe est situé encore plus haut, encastrée entre deux blocs de roche. Plus bas, la ville, plane, au loin, le paysage montagneux de la Chapada.
La professeure Maria Elizia Borges, qui enseigne l'histoire de l'art à la Faculté des Arts Visuels de l'Université Fédérale de Goiás, Goiânia, a rédigé un petit article, disponible ici, intitulé "Cemitério de Santa Isabel de Mucugê: uma arquitetura peculiar que visa preservar a memória dos entes queridos (BA)", soit "une architecture qui vise à préserver la mémoire des êtres chers". Le texte donne quelques indications historiques et entre dans les détails de l'ornementation des tombes.
C'est cette référence qui me permet de parler du byzantin.
Cf. aussi le pdf illustré "Cemitério de Santa Isabel Mucugê, Chapada Diamantina, Estilo bizantino", Lara Aline Ac, Equipe CEMITERIOSP.